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Les institutions démocratiques : à dissoudre ?

D’énormes sommes d’argent dépensées pour la mise sur pied des instances qui se révèlent par la suite être simplement budgétivores, sans aucun apport concret dans l’amélioration des conditions de vie du peuple. Assemblée nationale, Sénat, Conseils municipaux et régionaux.

 

Les élections régionales auront lieu au Cameroun le 6 décembre  2020, pour la mise sur pied des conseils régionaux, avec lesquels le Cameroun aura complété  les instances d’un gouvernement démocratique, celui du peuple, pour le peuple, par le peuple. En démocratie en effet, l’Assemblée nationale, le Sénat, le Conseil régional et le Conseil municipal sont autant d’instances dans lesquelles le peuple choisit ses représentants, qui doivent à chaque niveau œuvrer pour son bien-être. En la matière donc on serait tenté de dire que le Cameroun est sur le chemin de la démocratie depuis longtemps.

La Chambre basse…

Parlant de l’Assemblée nationale, elle a une longue histoire, intimement liée à celle du Cameroun. Elle est la première institution du Cameroun de l’ère moderne. Au départ, on avait côté Cameroun oriental sous la domination française, l’Assemblée Représentative du Cameroun (ARCAM) qui a vu le jour le 22 décembre 1946 en application de la loi française du 7 Octobre 1946 instituant des Assemblée Représentatives dans les ex-colonies françaises. Premier moyen accordé aux populations autochtones de participer à la vie politique de leur pays, l’Arcam était à l’origine composée de 40 membres dont 24 Camerounais et 16 Français. Elle se mua successivement en Assemblée Territoriale du Cameroun (ATCAM) le 30 mars 1952 puis en Assemblée Législative du Cameroun (ALCAM) le 10 mai 1957 et, le 10 avril 1960, en Assemblée Nationale. Les archives n’indiquent pas qui était le président de l’Arcam, mais le contexte de l’époque caractérisé par la mainmise de la France laisse penser que le poste pouvait même rester vacant, quitte à ce que des manœuvres subtiles soient utilisées pour la contrôler. L’Atcam quant à elle a connu deux présidents, Paul Soppo Priso pendant 4 ans de 1952 à 1956, et Ahmadou Ahidjo pendant 6 mois de janvier à mai 1957. Il céda le perchoir le même mois à Jules Ninine qui prit le relais avec l’Assemblée législative de mai 1957 à octobre 1958, remplacé par Daniel Kemajou pendant un an, à son tour remplacé par Jean Baptiste Mabaya de 1959 à 1960. De 1960 à octobre 1961, date de la réunification, c’est Louis Kemayou qui présida aux destinées de l’Assemblée législative, toujours au Cameroun oriental. Parallèlement, au Cameroun sous administration britannique, en application de la Constitution Macpherson, plusieurs Camerounais siégeaient dans les organes législatifs du Nigeria notamment à la chambre des Représentants et dans l’AssembléeRégionale. Ces différentes Chambres furent remplacées, en 1962, par une Assemblée Fédérale qui, à la suite de l’avènement de l’Etat unitaire et conformément à l’article 12 de la Constitution du 2 Juin 1972, a laissé la place à la seconde Assemblée Nationale aux termes des élections législatives du 18 mai 1973. Après la réunification, l’Assemblée nationale a été présidée successivement par Marcel Marigoh Mboua de 1962 à 1973, soit 11 ans, Salomon Tandeng Muna de 1973 à 1988 soit 15 ans, Lawrence Fonka Shang de 1988 à 1992, soit 5 ans, et de 1992 à ce jour 2020, Cavaye Yeguié Djibril, soit déjà 28 ans.

…et haute

Jusqu’en 1996, l’Assemblée nationale formait seule le Parlement. Avec l’adoption de la loi constitutionnelle N°96/06 du 18 Janvier 1996, ce Parlement devient bicaméral, avec une Assemblée Nationale composée de 180 Membres élus au suffrage universel direct et secret pour un mandat de 5 (Cinq) ans, et un Sénat composé de 100 membres dont 70 sont élus au suffrage universel indirect sur une base régionale, et 30 nommés par le Président de la République. Dans le principe, le Sénat au Cameroun représente les collectivités territoriales décentralisées, que sont les communes et les régions. Il a pour mission d’adopter les lois, d’apporter des amendements ou proposer une relecture des textes soumis à son examen. Par ailleurs, l’article 6 alinéa 2 de la Constitution du 16 janvier 1996 confie au Président du Sénat la mission d’exercer l’intérim du Président de la République en cas de vacance et ce jusqu’à l’élection du nouveau Président. Les premières élections sénatoriales camerounaises ont été organisées le 14 avril 2013, 70 sénateurs ont été élus au terme du scrutin, dont 56 du parti au pouvoir le Rassemblement démocratique du peuple Camerounais et 14 du Social democratic front. 30 autres furent nommés le 8 mai 2013 par le président de la république. Cette chambre haute a été renouvelée par les élections du 25 mars 2018 dont les résultats ont été proclamés le 5 avril 2018. A l’issue du scrutin, le RDPC a remporté 63 sièges et le SDF seulement 7, soit deux fois moins que lors de la première législature, et le nombre des sénateurs a été complété  le 12 avril 2018.

Peine perdue ?

Tout fonctionne donc normalement pour ce qui est du Parlement au Cameroun, depuis que ses bases ont été posées en 1946 avec l’Assemblée représentative du Cameroun. 74 ans de fonctionnement de l’Assemblée nationale, et déjà 8 ans de fonctionnement du Sénat. Pour quel résultat ? Dans les archives, on cherche toujours une loi proposée par les députés qui ait jamais été votée et mise en application pour le bien-être du peuple qui leur a confié ce rôle. Par contre, tous les projets de lois soumis par le gouvernement sont applaudis et adoptées sans modifications de la moindre virgule. Toutes les lois du Gouvernement, dont beaucoup ne tiennent pas compte des aspirations du peuple mais des agendas des gouvernants. Le Parlement s’est révélé être en réalité une passoire, parfois dangereuse pour le pouvoir lui-même, qui a été obligé à plusieurs reprises de rattraper les manquements et les imperfections des lois que les députés et les sénateurs avaient applaudies et adoptées. Le dernier exemple en date est la loi de finances 2019 qui instaurait le recouvrement des frais de douane sur les téléphone chez l’utilisateur, dont le gouvernement a finalement demandé de sursoir à son application, la même loi de finance 2019 qui avait déjà été corrigée par une ordonnance du président de la république le 29 mai 2019, revoyant l’enveloppe à la baisse et réduisant plusieurs lignes de consommations y compris celle de la présidence de la République. Si les députés et sénateurs qui sont supposés contrôler et corriger les actes du gouvernement, se font plutôt corriger par ce dernier, il y a de quoi être inquiet. C’est à se demander s’il ne serait pas mieux de dissoudre simplement ce Parlement. Les milliards qu’il englouti d’années en années pourront permettre de construire quelques puits d’eau à Salane dans l’Extrême Nord ou quelques salles de classes à Ndocbouné par Nkondjock dans le Nkam.

Et que dire des conseils municipaux, qui annoncent les Conseils régionaux, nous y reviendrons.

Roland TSAPI